« (…) Cette restauration est ainsi exemplaire car, plutôt que d’éclaircir un film et d’y mettre de l’ordre, elle l’introduit au contraire dans son propre trouble, restitue sa complexité, comme si, en définitive, la caméra explorait l’esprit fiévreux d’un jeune homme en proie aux doutes, Jean Vigo, mort à vingt-neuf ans le 5 octobre 1934. »
Antoine de Baecque, Cahiers du cinéma, n°434, juillet-août 1990, p. p. 50-51.
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« (…) C’est ce dimanche 13 mai 1990 que le film maudit vient de renaître dans toute sa beauté, son originalité d’écriture, son réalisme social et poétique, son exaltation de l’amour fou, son aspect onirique, son esprit anarchiste, son rythme narratif auquel s’accorde la musique de Maurice Jaubert, qui a parfois des accents à la Kurt Weill, et ses merveilleux interprètes : Dita Parlo, Jean Dasté, Michel Simon, Gilles Margaritis… Un choc, un éblouissement, même pour les cinéphiles. Et pour celle qui, à peine plus âgée que le film, se tenait, les larmes aux yeux, à la sortie de la salle : Luce Vigo, fille de Jean. »
J(acques) S(iclier), Le Monde, 15 mai 1990.
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« (…) Il aura donc fallu attendre cinquante-cinq ans cette résurrection d’une œuvre maîtresse du cinéma, qui retrouve sous nos yeux sa respiration, son ampleur, ses vraies tensions et ses vrais repos. Je m’étonne que l’évènement ne fasse pas plus de bruit. Il est vrai que la postérité au travail a tout le temps devant elle. Je vous fiche mon billet, en tout cas, que, d’ici cent ans, le négatif de L’Atalante atteindra dans une vente aux enchères la somme astronomique que l’on paye aujourd’hui pour une toile de Van Gogh. »
Claude-Jean Philippe, France-soir, 31 mai 1990.
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« (…) C’est donc un film entièrement rénové que le spectateur contemporain découvre. Celui qu’avait imaginé Vigo ? On ne le saura jamais et, personnellement j’en doute quant à quelques plans (pourquoi avoir gommé les incertitudes de celui de la fin, témoignage tragique de l’accident d’avion qui a failli coûter la vie à l’équipe ?). Mais, pour l’essentiel, les nouvelles générations vont se mettre sous la dent, au sein des meilleures conditions possibles, un film d’artisan génialement inspiré, qui fait fi de toutes les lois de la pesanteur pour inventer une forme de représentation qui n’appartient qu’à lui. »
Jean Roy, L’Humanité, 2 juin 1990.
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« (…) L’Atalante est, en toute simplicité, un chef-d’œuvre. Même les paroles de la chanson, écrite par Charles Goldblatt (qui joue le pickpocket dans le film), restent en mémoire : « Les couteaux d’table / Aux reflets changeants / Sont inoxydables / Éternellement. » La résurrection de L’Atalante est, bien sûr, un miracle. Pierre Philippe : « Retrouver certaines scènes a été, pour nous, comme l’apparition de la Vierge dans le pilier de Notre-Dame pour Claudel. »
F(rançois) F(orestier), L’Express, 4 mai 1990.
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« (…) Rayonnant d’humour et d’amour, d’images poétiques et réalistes sans cesse entremêlées, ce chef-d’œuvre vient à point tenir ici le rôle de témoin des efforts menés désormais dans plusieurs pays pour la conservation et la restauration des films menacés de perdition. »
Jeanine Baron, Le Quotidien de Paris, 16 mai 1990.
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« (…) Insubmersible, L’Atalante revient aujourd’hui par la grande porte du festival de Cannes (qui l’a présenté dimanche dans le cadre de la journée de sauvetage et de conservation des films) dans sa version quasi originale : deux cinéphiles ont, patiemment, recollé les morceaux en fouillant dans les archives de la société Gaumont. On découvre des scènes jusque-là inédites, comme celle où Michel Simon fume une cigarette… avec son nombril… Ressuscitée, « L’Atalante » toute neuve est depuis le 23 mai sur les écrans. Il ne faut pas la manquer. »
Anonyme, Les Échos, 28 mai 1990.
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« L’Atalante est un des plus beaux films du monde. On n’en connaissait que des copies misérables, au montage bizarrement remanié, encombrées d’une chanson (Le chaland qui passe) qui prenait abusivement la place de la belle partition de Maurice Jaubert. La Cinémathèque Gaumont, Pierre Philippe et Jean-Louis Bompoint, à partir des éléments en leur possession (copies retrouvées, chutes, multiples états du scénario, notes de Jean Vigo, souvenirs de ses collaborateurs), ont effectué sur ce matériel un travail admirable. Il ne s’agit
pas seulement de réaliser un (indispensable et parfait) nettoyage technique destiné à rajeunir un chef-d’œuvre, mais de s’approcher le plus possible du film idéal de Jean Vigo, désormais éblouissant de jeunesse et de fraîcheur. La grande actualité poétique, aujourd’hui plus que jamais, c’est l’Atalante. »
D. (ominique) R. (abourdin), L’Évènement du jeudi, 31 mai 1990.
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